Tour de Babel revisitée…
La réformette de l’orthographe
imaginée en 1990, médiatisée en 2016 pour détourner l’attention du bon peuple, a fait beaucoup parler sans changer quoi que ce soit dans la communication réelle, celle qui fait que les hommes se parlent entre eux directement.
Il y a bien plus grave. L’évolution du vocabulaire.
Que des mots nouveaux apparaissent, même s’ils sont ridicules aux oreilles des non-initiés, passe.
Plus bel exemple dans l’actualité avec les commentaires super snobinards à propos de Roland, comprenez tournoi de tennis Roland Garos…
Que l’on change
le sens des mots sans juger utile de le préciser, et c’est le lien social qui disparait, le dialogue démocratique qui devient impossible et tourne à l’affrontement au risque de détruire la cohésion nationale mise
à mal depuis trente ans.
Otage, ça veut dire quoi ?
Être enlevé et menacé
de mort par des terroristes ou être retardé dans une file d’attente devant une station-service, ou sur un quai de gare ?
Concertation, ça veut dire quoi ?
Dialogue, écoute, partage avant décision ou information à propos de décisions déjà prises ?
Deux exemples locaux de concertations, véritables emballages pour cadeaux empoisonnés.
Vestiges de Saint-Géraud : l’association
pour la mise en valeur des vestiges a été invitée aux trois comités de pilotage où, sans avoir eu les documents présentés assez tôt pour les étudier avant les réunions, elle a pu découvrir
l’évolution du dossier... évolution décidée en « ateliers » où elle n’a pas été invitée car les centaines d’adhérents de l’association n’ont
jamais été considérés comme des « acteurs ». Il est maintenant évident que la mise en valeur des vestiges sera, en réalité, un grand ménage dans le quartier avec enfouissement des
vestiges.
Nouvelle sectorisation dans le primaire à Aurillac : multitude de « groupes de travail »… mais pas une fois, l’inspection académique
n’a jugé utile de participer à un conseil d’école, après la proposition-décision de fermer l’école de Marmiers. Suite à la fabuleuse convention « État/association des maires
du Cantal », la mairie d’Aurillac a cédé au chantage de l’administration et devra assumer la fermeture de l’école du quartier le plus en difficultés de la ville.
En cliquant sur « destructions », en haut à gauche de cette page, vous découvrirez
à quel point les 150 élèves, leurs parents, leurs enseignants, le personnel d’assistance et de service et tout le quartier ont été pris pour des spectateurs, jamais pour des acteurs, alors qu’ils étaient
les premiers concernés. Prenez le temps de lire la lettre adressée à Pierre Mathonier, maire de la ville, par trois directrices d’école à la retraite.
Dans ces deux cas précis, on se demande, comme d’habitude, si quelques actions spectaculaires, avec « prise d’otage » de décideurs par exemple, n’auraient pas été
plus utiles pour sauver des causes justes que les dizaines d’heures passées à palabrer dans le vide face à des murs.
Au niveau national, pour justifier le
lancement de la loi Travail, la triplette Hollande/Valls/Macron a évoqué la nécessité de simplifier le code du travail. Quatre mois après on constate que l'artcle qui
bloque la France veut instaurer des dizaines de milliers de versions du code du travail dans des dizaines de milliers d'entreprises : ça veut dire quoi "simplifier" ?
Entretenir la flamme citoyenne…
toujours si prompte à s’éteindre.
Il y a eu l'assassinat des journalistes de Charly hebdo le 7 janvier 2015 puis les massacres du bataclan le 13 novembre de la même année.
Il
y a eu la grande marche républicaine et citoyenne du 11 janvier 2015 et, sur la lancée, un regain de civisme, la mise au premier plan de la citoyenneté ; sur la lancée aussi, des initiatives furent prises en direction de l'Éducation
nationale, entre autres, la "réserve citoyenne" fut créée, etc.
Je pensais à tout cela, le matin du 8 mai en me rendant à la cérémonie
commémorative aux monuments aux morts à Aurillac.
Je pensais à ce 8 mai 1945 dont je garde un souvenir précis : il faisait un très beau
temps, l'auberge du village débordait de joie, de cris, de chants…d'alcool !
Je pensais aux atrocités de cette guerre : les camps d'extermination,
les dizaines de milliers de morts, les centaines de milliers de prisonniers ; je pensais à Murat, à St Flour, à Soubizergues, à Ruines, à Clavières, au Pont Rouge…
Je m'attendais donc, plus encore qu'au 11 novembre 2015 -la tuerie du Bataclan c'était le 13-, à une participation massive.
Il y avait les
représentants de toutes les associations d'anciens combattants et victimes de guerre, avec ou sans drapeaux. Ils avaient été rangés brutalement devant le monument aux morts par Mme la directrice de l'ONAC -Office National
des Anciens Combattants- aux pratiques et aux accents peu respectueux.
il y avait l'harmonie municipale.
Il y avait plusieurs chefs de service départementaux civils et militaires et aussi quelques citoyens au civisme indestructible.
Il y avait enfin des enfants
des écoles avec leurs instituteurs et madame l'inspectrice d'Académie était présente. C'est l'occasion de dire une chose simple : nous savons bien que les temps ont changé et que nous ne reverrons pas les marches du
Palais de justice couvertes d'enfants des écoles par centaines mais il y a bien, pour les années à venir, un problème à résoudre, c'est la présence, à cette cérémonie et à celle
du 11 novembre, des établissements scolaires : direction, enseignants, élèves ou étudiants ; puisque c'est là que tout commence !
Il y
avait, il y avait…
Il n'y avait pas M. le préfet, pas M. le Président du Conseil départemental, pas M. le Maire d'Aurillac, pas M. le député,
pas M. le sénateur !...
Certes, les trois premiers étaient "représentés" et des gerbes de fleurs furent déposées en leurs noms
ainsi qu'une au nom du sénateur.
Mais la réalité, c'est que ces cinq "autorités" n'étaient pas là. Elles connaissaient pourtant
la date de la cérémonie depuis un an au moins ; le 8 mai tombait bien cette année le 8 mai !
Il ne nous vient pas à l'esprit de penser que ces gens-là
étaient partis se promener. Non, s'ils n'étaient pas là, c'est qu'ils étaient ailleurs ; c'est qu'ayant deux choses -au moins- à faire, le même jour à la même heure, ils avaient choisi.
Ils avaient choisi de ne pas venir au chef-lieu du département honorer les victimes de la seconde guerre mondiale !
PA
PS : nous n'aurons pas la cruauté de parler du compte rendu de cette cérémonie dans le journal La Montagne : à peine plus d'un quart de page,
une photo, une légende insipide…